La tutelle du Prophète (saws)

 

'Abdallâh, le père du Prophète (saws) est mort quelques semaines avant que son fils ne naisse. C'est son grand-père 'Abd Al-Mottalib qui s'occupa de l'enfant et de sa mère.

L'allaitement du Prophète (saws)

La 1ère femme à allaiter le Prophète (saws) fut sa mère, Âmina Bent Wahb.

La 1ère femme à allaiter Mouhammad (saws) après sa mère fut Thuwaibah, la captive affranchie de son oncle Abou Lahab. Ceci eut lieu pendant la période où elle allaita son propre fils, Masrouh.

Avant d'allaiter Mouhammad (saws), elle avait allaité Hamzah Ibn 'Abd Al-Mottalib, qui est donc son frère de lait, et ensuite Abou Sala-mah Ibn 'Abd Al-Asad Al-Makhzûmi.

Mouhammad chez les Béni Sa'd

Les arabes sédentaires avaient pour coutume de confier leurs enfants à des nourrices qui vivaient à l'extérieur de la Mecque dans le désert. Celles-ci les emmenaient chez elles jusqu'à un certain âge et les allaitaient.

    Plusieurs raisons expliquent cette pratique:
    - Lors des pèlerinages, les gens affluaient de différentes régions, d'où le mélange de différentes langues, ce qui pouvait ainsi entacher la langue arabe de leurs enfants. Mais les arabes attachaient beaucoup d'importance à la richesse et la pureté de leur langue qu'est la langue arabe, et voulaient donc que cette éloquence soit préservée. D'ailleurs, le Prophète (saws) exprima un jour sa fierté du fait de la noblesse de sa souche, en disant :"je suis le plus éloquent en arabe entre vous : je suis Qouraychite et fut mis en nourrice chez les Béni Sa'd".
    - D'autre part, les Qouraychs, attendaient de ces pratiques l'acquisition d'un courage intrépide par leurs enfants, du fait de la difficulté de vie en dehors de la Mecque.
    - Aussi, de nombreuses maladies étaient présentes dans les métropoles et il était plus prudent de les en écarter durant les premiers moments de leur vie.

Un contingent de la tribu de Sa'd Ibn Bakr, branche des Hawâzinites, se rendit alors à la Mecque. Parmi cette tribu se trouvait Halîma, future nourrice de Mouhammad, qui était très pauvre. A cause de sa monture maigre et fatiguée, elle arriva à la Mecque assez en retard sur les autres, et ne put trouver un enfant de riche. Personne n'avait voulu prendre

Mouhammad (saws) car celui-ci était orphelin. Les nourrices cherchaient évidemment les enfants dont les parents étaient riches. Ne voulant pas rentrer les mains vides, elle le prit alors, et ne le regrettera jamais...

Bénédictions chez les Béni Sa'd

La vie chez une nourrice nomade ne pouvait être que très simple : la tribu passait les différentes saisons en divers endroits; les enfants surveillaient toute la journée les troupeaux dans les pâturages, et jouaient ensemble ; les femmes ramassaient le bois pour la cuisine, entretenaient leurs foyers, et s'occupaient à filer. On se contentait quelquefois de dattes et de lait; parfois on mangeait des légumes, de la viande par exemple, et, lors des foires ou des visites aux « grandes villes » comme la Mecque, quelques friandises. Il pouvait y avoir des razzias et des guerres entre les tribus, mais nos sources n'en mentionnent aucune concernant la tribu de la nourrice Halîma.

Le jeune Mouhammad (saws) se comportait comme tous les autres enfants. On rapporte qu'un jour, pour une raison que les narrateurs ne mentionnent pas, il mordit l'épaule de sa sœur de lait avec une telle vigueur que la trace lui resta toute sa vie, mais elle n'eut pas à regretter ! Plus tard en effet, dans une expédition, l'armée du Prophète fit un certain nombre de prisonniers, parmi lesquels se trouva Chaimâ', cette sœur de lait. Lorsqu'elle rappela à Mouhammad (saws) l'incident et lui montra l'incision sur son épaule, il la reconnut aussitôt, et elle fut traitée avec tous les égards dus à une sœur bien aimée (Ibn Hichâm.p. 856-857 ; Balâdhuri, § 161.).

La grande foire annuelle de 'Ukâz avait lieu dans la région. On y rencontrait quelquefois Halîma et son nourrisson, et l'on rapporte que Halîma demanda à un astrologue-devin de la tribu de Hudhail, qui exerçait son métier à la foire, de prédire le destin de l'enfant (Ibn Sa'd, I/I, p 98.)

La « fente de poitrine »

Alors que le Prophète (saws) avait 4 ou 5 ans, il se passa un évènement que raconte Halîma elle-même dans son récit: [...] Quelques mois après notre retour, alors qu'il gardait les moutons avec son frère de lait, derrière les tentes, celui-ci vint en courant nous dire :
Mon frère le Qouraychite vient d'être saisi par 2 inconnus habillés en blanc, qui l'ont mis à terre et lui ont ouvert le ventre ! Nous accourûmes vers lui. Il était debout et pâle.Je le serrai dans mes bras, ainsi que mon mari.
-Qu'as-tu mon enfant, lui dis-je ?
-Deux hommes habillés en blanc, dit-il, m'ont couché par terre et m'ont ouvert le ventre pour y chercher je ne sais quoi [...]

Le Prophète (saws) montrera plus tard la trace de sa cousure aux Compagnons (,), et Anas Ibn Mâlik (ra) témoignera en disant : J'ai vu la trace de la poitrine du Prophète.

Retour de Mouhammad chez sa mère

Après cet évènement, Al-Harith dit à sa femme qu'il vaudrait peut-être mieux rendre Mouhammad (saws) à sa mère, car celui-ci pensait qu'un mal l'avait atteint :
-Halîma, me dit mon mari, je crains que l'enfant ne soit atteint de quelque mal. Ramenons-le chez sa mère avant que sa situation ne s'aggrave. Ce que nous fîmes.
-Qu'est-ce qui t'amène, aimable nourrice? me dit sa mère. N'as-tu pas tenu à le garder ?
-Notre enfant, lui dis-je a atteint l'âge voulu et mon devoir est rempli. Je crains pour lui des imprévus. Je te le ramène dans les meilleures conditions désirées.
-Qu'a-tu donc ? me dit-elle. Dis-moi sans feinte ce qu'il en est.
Elle ne me laissa pas de faux fuyants pour cacher ce qui arrive, et je finis par lui dire la vérité.
-Crains-tu les mauvais esprits pour notre enfant ?
-Oui ! lui répondis-je. Par Allâh, me dit-elle, ils n'ont nulle prise sur lui. Mon fils a un grand destin. Veux-tu que je t'en parle ? Je vis, lorsque je le portais, sortir de moi une lumière qui me fit voir éclairer les palais de Bosra au Chêm. Ma grossesse fut la plus aisée. Quand il vint au monde, sa tête était vers le ciel et ses mains étaient posées sur le sol. Tu peux le laisser et repartir sans souci !

C'est ainsi que s'accomplit l'allaitement du Prophète (saws) chez les Béni Sa'd, Celui-ci dura 2 ans. Cette durée sera ensuite confirmée par l'islam (Coran, s2v233).

Mort d'Âmina

Âmina partit un jour avec son noble enfant pour Yathrib (Médine), afin de visiter ses oncles maternels, les Béni Najâr.C'est sur le chemin du retour qu'Âmina trépassa soudainement à Abwâ'; le Prophète (saws) n'avait alors que 6 ans. Plus tard, toutes les fois qu'il (saws) passait par Abwâ', au cours de ses expéditions, le Prophète (saws) s'arrêtait pour visiter le tombeau de sa mère, et versait d'abondantes larmes (Ibn Hichâm, p 107 ; Suhailî, I, 113.)

Rappelons ici un incident postérieur : un jour un visiteur nomade s'étant mis à trembler quand on le présentait au Prophète (saws), celui-ci de dire : « Pourquoi as-tu peur d'un homme dont la mère mangeait souvent de la viande séchée ? (Hâkim, Mustadrak, III, 48 ; Sarakhsî, Mabsûl, XVI, 79.)

On a conservé plusieurs poèmes d'Âmina (Ibn Sa'd, I/I, p.62 ; Balâdhuri, I, § 159 ; Ibn-Habîb, Munammaq p 422, etc.), et aussi d'autres parentes (Ibn Hicham, p 108-111.) de la famille de 'Abd Al-Mottalib, ce qui montre que le niveau intellectuel dans cette famille était assez élevé, même parmi les femmes.

Oum Aiman, l'affranchie de son père se chargea alors du Prophète (saws). Elle parvint à rentrer à la Mecque avec l'enfant, après avoir assisté à l'enterrement d'Aminah. Elle le remit à son grand-père, 'Abd Al-Mottalib, âgé alors de 108 ans, prit son petit-fils chez lui. Il fit donc son 2ème tuteur. Comme l'enfant avait perdu son père aussi bien que sa mère, l'affection du grand-père envers lui était naturellement très grande.

Et Voici quelques exemples témoignant des égards que portait 'Abd Al-Mottalib envers son petit-fils, ainsi que quelques autres anecdotes témoignant :

On rapporte que toutes les fois que 'Abd Al-Mottalib s'asseyait sur un tapis dans un conseil municipal pour discuter avec les autres conseillers des questions sérieuses, l'enfant Mouhammad aimait à laisser ses jouets et à venir assister au conseil; il voulait s'asseoir à la première place, à côté de son grand-père. Ses oncles le lui défendaient, mais le grand-père disait toujours : « Laissez-le ; il se croit un grand homme, et j'espère bien qu'il va l'être ; il est si sage.» (Ibn Hichâm, p. 108 ; Balâdhurî, I, § 143- Ibn al-Jauzî, Wafâ, p. 102, 120,130.)

Il était en effet bien sage, jamais l'assemblée n'eut à se plaindre qu'il les dérangeât. Le grand-père l'aimait tant qu'aux dires des chroniqueurs (Suhailî.1, 179 ; Balldhuri, I, §146.), un jour, lors d'une disette, il pria Dieu pour la pluie en Le suppliant au nom de son petit-fils, et il ne fut point déçu.

A l'âge de 7 ans, Mouhammad (saws) eut mal aux yeux, et les « médecins » de la Mecque ne purent le guérir. On rapporte que 'Abd Al-Mottalib se rendit alors au couvent d'un religieux chrétien, près de 'Ukâz, où on lui donna une prescription qui réussit très bien (Halabî, Insân, I, 149.)

C'est apparemment d'une époque postérieure que nous parle Al-Qifti (Akhbâr al Hukamâ ; ('Uyûm Al-Anbâ' éd. 1299), p 110 ; ibn Hajar, Isâbah, No 1471, § Haritch Ibn Kaladah.) lorsqu'il raconte qu'étant tombé malade, Mouhammad avait demandé à son ami Sa'd Ibn Abi-Waqqas de faire venir le médecin mecquois Al-Hârith Ibn Kaladah.

Le jeune garçon Mouhammad (saws) était si intelligent que toutes les fois que son grand-père ou d'autres parents avaient perdu quelque chose, ils demandaient toujours à Mouhammad d'aller le chercher, et il le trouvait toujours (Balâdhuri I,§ 144).

Une fois le berger de 'Abd Al-Mottalib vint annoncer que quelques chameaux s'étaient égarés, et qu'il lui était impossible de les retrouver dans les vallées du pâturage. Mouhammad (saws) y fut envoyé ; comme il tardait à revenir, le grand-père, effrayé pour le sort de son petit-fils, parti ainsi tout seul, la nuit, dans les montagnes, se mit à prier Dieu, avec ferveur et à faire le tour rituel de la Ka'bah, en disant: «Seigneur, rends-moi mon petit Mouhammad, Et comble-moi ainsi de Tes bienfaits.»

Une fois Mouhammad (saws) rentré, 'Abd Al-Mottalib fit le vœu de ne plus jamais envoyer le garçon faire de pareilles courses (Balâdhurî, I, § 144)

Mort de 'Abd Al-Mottalib

Mouhammad était âgé de 8 ans, lorsque son grand-père mourut, après l'avoir confié à son fils Abû-Tâlib, oncle germain de Mouhammad, en lui recommandant d'en avoir le plus grand soin (Ibn Sa'd l/l, p 75; Tabari. I, 1123.). Abû-Tâlib fut ainsi son 3ème tuteur. Le Prophète (saws) restera sous sa garde jusqu'à l'âge de raison.

Garde par Abou Tâlib

Le choix d'Abou Tâlib comme tuteur de Mouhammad (saws), de préférence aux autres oncles, a été particulièrement heureux. Né de la même mère et du même père que le père de Mouhammad (saws), Abou Tâlib possédait des qualités de cœur très rares. Nous voyons qu'Abou Lahab, un autre de ses oncles devint, bientôt après la mort de son père, un libertin, adonné à la boisson et à la vie facile ; il était allé une fois jusqu'à voler les bijoux offerts à la Ka'bah, afin d'avoir de l'argent pour acheter du vin et pour en donner aux chanteuses. (Ibn Habîb,Munammaq p 54.67. Dîwan de Hassan ibn Thâbit, p 51-57, note sur le poème N°39 ; Tabarî, I, 1135) Par contre, les qualités d'Abou Tâlib lui attiraient de plus en plus le respect de ses concitoyens. Sa seule faute, en réalité un excès de générosité, était de ne pouvoir jamais équilibrer son budget familial, et d'être souvent obligé de recourir aux emprunts.

De sa tante, épouse de son tuteur, Mouhammad (saws) nous dit lui-même : «Lorsqu'elle mourut, quelqu'un me fit la remarque : «Ô Envoyé de Dieu, pourquoi ressens-tu si douloureusement la mort d'une vieille femme ?» Et je répondis : « Pourquoi pas ? Lorsque j'étais un enfant orphelin chez elle, elle laissait ses enfants avoir faim, mais elle me nourrissait ; elle délaissait ses enfants pour me peigner; et elle était comme ma mère.»» (Ya'qûbî, II, 14 ; Suhailî, I, 112)

Lorsque le petit déjeuner venait d'être servi, chez Abou Tâlib, tous les matins, la troupe de ses nombreux enfants le pillait avant que Mouhammad (saws) y ait touché ; quand Abou Tâlib s'aperçut que son jeune neveu ne prenait pas part à ce pillage il le lui fit servir à part.(Ibn Sa'd, I/I,p 46 ; Maqrîzî, Imtâ', I, 7)

A cette époque, il n'y avait pas d'école à la Mecque ; c'est pourquoi il n'apprit ni à lire ni à écrire. Bientôt le jeune garçon commença à travailler comme berger pour les Mecquois, gagnant ainsi quelques sous pour ajouter aux maigres recettes de son oncle (Ibn Hichâm, p 106 ; Suhailî, I, 112 d'après Bukhârî, etc. ; Ibn Sa'd, I/i, p 80). On nous rapporte de cette époque un petit incident : il apprit un jour qu'il y aurait une fête chez une personnalité de la ville, et il dit à un de ses camarades : je n'ai jamais assisté à une fête ; si tu peux garder mon troupeau en même temps que le tien, j'irai à la ville, et je te remplacerai un autre jour.

Le camarade ayant accepté, il vint à la ville, mais la fête n'était pas encore près de commencer ; il faisait probablement chaud, et, en attendant, le jeune garçon s'endormit. Lorsqu'il se réveilla, il était déjà tard, et il dut rentrer chez lui. L'incident se répéta, dit-on, encore une fois dans de pareilles circonstances. Blessé dans son amour propre, le jeune garçon renonça pour toujours à s'amuser à de telles frivolités. (Suhailî, I, 112, d'après Bukhârî ; Tabari, I, 1126-7)

Un autre souvenir de la même époque : Mouhammad (saws) disait plus tard : «Mangez les fruits de l'arbre épineux arâk qui sont devenus noirs ; je les mangeais lorsque j'étais berger.» (Ibn Sa'd, I/I, p 80) ou encore : «Le Prophète raconta un jour : J'avais l'habitude de me protéger contre le soleil aveuglant de la mi-journée dans l'ombre de l'immense écuelle de 'Abdallah ibn Jud'ân (qu'il avait fait fabriquer pour l'usage des voyageurs à dos de chameau.)(Suhailî, I, 92)

Mouhammad (saws) avait neuf ans, lorsqu'Abou Tâlib se vit obligé à l'idée d'être séparé, même pour peu de temps, de son oncle ; il lui demanda de l'accompagner ; Abou Tâlib céda, et c'est ainsi que Mouhammad fit son premier voyage hors de l'Arabie. On peut bien penser que le jeune voyageur n'était pas du tout un fardeau inutile pour son oncle : de mille façons il pouvait lui rendre de petits services, et lui épargner maints inconvénients.

A Busrà, au-delà de la Mer Morte, entre Jérusalem et Damas, la caravane s'arrêta pour faire les échanges usuels et les transactions nécessaires. Comme d'habitude, ils durent camper dans la banlieue de la ville. C'était un territoire byzantin. Ne nous étonnons donc pas s'il y avait un couvent, près des champs où la caravane établit ses tentes. Un certain moine, Bahîrâ, regarda de son couvent la colonie temporaire, et s'étonna du sage comportement de ses voisins, ce qui était rare chez de tels visiteurs.

Il les invita à un repas (Ibn Hichâm. p ll5-117.), probablement dans un but pieux de prosélytisme. Casanova nous assure (Casanova, Mohammed et la fin du monde, p 28,) qu'à l'époque dont nous nous occupons, les Chrétiens - et probablement aussi les Juifs - attendaient impatiemment la venue d'un prophète, d'un Messie, d'un dernier consolateur. (Cf.Evangile de St Jean, I :21-23) Il se peut que le moine Bahîrâ ait parlé à ses hôte, entre autres choses, de cette croyance.

Il serait naïf de croire qu'un moine chrétien (Carra de Vaux n'a rien ajouté à sa réputation quand il a rédigé tout un ouvrage intitulé :«La légende de Bahîrâ, ou un moine chrétien auteur au Coran », Paris 1898. Comment expliquer alors que ce même Coran, soit-disant ouvrage d'un moine chrétien réfute le christianisme ?) ait pu reconnaître dans la physionomie d'un enfant de neuf ans, surtout parmi les Bédouins méprisables, le futur apôtre de Dieu ; il serait également vain de penser que les paroles du moine aient pu faire germer dans l'esprit d'un garçon de neuf ans l'espoir et l'ambition de s'attribuer cette qualité.

Après ce voyage en Syrie, on ne sait pas grand'chose sur la vie de Mouhammad (saws) pendant une dizaine d'années. Il se peut qu'Abû Tâlib ait eu un magasin de commerce (Selon Jâhiz, Mahâsin, p 165, Abu Tâlib était un bazzâz (marchand d'étoffes)) à la Mecque, et que Mouhammad (saws) ait participé d'une façon ou d'une autre à cette entreprise. Il est vrai qu'Ibn Al-Jauzî (Wafâ', p 101) affirme que, quand le Prophète (saws) avait un peu plus de dix ans, il accompagna son autre oncle, Zubair, dans une caravane, pleine d'incidents miraculeux mais sans précision de la destination ; peut-être à Bahrain-'Umân pays des 'Abd al Qais (cf. Infra § 1599, n. 1) ; peut-être le même voyage palestinien qu'il fit avec Abou Tâlib, les deux frères sortant ensemble, puisque selon Ibn Al-Jauzi(Wafâ', p 131) Mouhammad (saws)avait alors 12 ans et non 9.

Al-Halabî (Halabî, Insân, I, 164) nous rapporte que les Mecquois avaient une fête annuelle, à laquelle tout le monde prenait part avec enthousiasme.

Chaque année Mouhammad trouvait quelque excuse pour ne pas y assister. Une année ses tantes le grondèrent et le mena­cèrent de la colère divine, parce qu'il ne voulait pas y assister avec les autres. Mouhammad (saws) les accompagna cette fois, mais en pleine fête il rentra dans la tente de ses parents, tout blanc et tout tremblant : il raconta qu'il avait vu d'étranges personnes qui lui défendaient toute participation à cette fête païenne.

L'oncle et les tantes ne l'obligèrent plus les années suivantes à participer à de pareilles cérémonies. Al-Wâqîdî complète le récit par le témoignage d'Oum Aiman, servante noire qui avait élevé Mouhammad (saws), et dit ensuite qu'il s'agissait là de la fête de Buwânah, et que, lors de cette fête, on se faisait raser la tête et on sacrifiait des animaux.

D'après Ibn al-Athîr (Cilé par Lisân al.Arab, § B-W-N.) , la colline de Buwânah se trouve près de Yanbû'. Ibn Manzùr (Ibid) nous conserve un vers, où le poète dit attendre que les sentinelles du dattier sacré de Buwânan fussent endormies pour cueillir secrètement les fruits de deux dattiers.

Ibn al-Kalbî (Ibn al-Kalbî, Kiidb al-Asnâm, p. 12) nous rapporte que Mouhammad (saws) aurait lui-même un jour sacrifié, avant l'Islam, un mouton brun devant une idole (sanam) ; il s'agit là probablement du même incident, et la victime avait sans doute été pro­curée par ses tantes superstitieuses. Bukhârî (Bukhâri 63/24 ; cité aussi par Suhaîlî, I, 146-147) rapporte qu'un jour Mouhammad (saws) rencontra son concitoyen Zaid ibn 'Amr près de Baldah et que l'un des deux-le narrateur n'est pas sûr- offrit à l'autre la viande d'une victime immolée sur une idole, mais il lui fut repondu. : je ne mange pas ce qu'on offre aux idoles. Bukhari est plus clair ailleurs (72:16) et précise que c'est le Prophète (saws) qui offrit un plat de viande à Zaid Ibn 'Amr et que c'est Zaid qui refusa de manger la chair des animaux sacrifiés sur les pierres dressées ( ansàb ).

Commentant le même hadîth, Qastallânî (Irchâd,8/277) cite «Abu Ya'là, al-Bazzâr et autres » pour dire que ce fut son affranchi Zaid ibn Hârithah qui égorgea un mouton sur certaine pierre dressée et que Zaid Ibn 'Amr qu'on rencontra, refusa l'invitation à l'hospita­lité, et dit : Je ne mange pas ce sur quoi on n'a pas mentionné le nom de Dieu. S'agit-il là du même événement ?. Le jeune esprit devenait de plus en plus conscient de ce qui se passait autour de lui.

Faut-il placer à la même époque le petit incident suivant qui semble avoir quelque portée ? Balâdhuri (Balâdhurî, I, §263.) rapporte qu'un jour il y eut une querelle entre Abu Tâlib et son frère Abou Lahab,et ce dernier jeta son frère à terre, s'assit sur sa poitrine et le souffleta. Le jeune Muhammad accourut, et en bousculant Abou Lahab, l'éloigna de la poitrine de son frère. Puis Abu Tâlib se leva, et plein de colère s'élança sur son frère Abu Lahab ; à son tour il s'assit sur sa poitrine et couvrit son visage de souf­flets. Après coup, Abu Lahab s'adressa à Muhammad en lui disant : «Moi, je suis ton oncle comme Abu Tâlib ; tu as fait avec moi ce que tu as fait ; mais pourquoi n'as tu pas agi pareillement avec lui ? Par Dieu, mon coeur ne t'aimera plus jamais,jamais ». On sait que parmi les membres de la famille, Abou Lahab fut le seul à s'associer avec les ennemis personnels les plus redoutables du Prophète (saws). D'autres incidents vinrent plus tard élargir le fossé entre l'oncle et le neveu.

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